80 ans de la Libération à Vannes : les Archives départementales n’ont pas livré tous leurs secrets

De la vieille histoire, la Libération ? Elle a eu lieu il y a 80 ans, mais son récit est loin d’être achevé. Des lettres, vieux papiers et photographies d’époque continuent de parvenir, chaque année, aux Archives départementales du Morbihan, à Vannes, donnant un éclairage riche et très local sur cette épopée, confiées par des familles lors d’un décès ou d’un déménagement.

Archives privées : le cas du château du Bot

Ainsi, en septembre dernier, l’archiviste Arnaud Guguin a reçu du pur nectar : le fonds, « très particulier, unique et inédit », donné par la famille Le Barbier de Blignières établie au château du Bot, à Hennebont. « Pendant la Seconde guerre mondiale, le château a été réquisitionné par des officiers allemands. Au début, ils s’installent dans certaines pièces et cohabitent. Mais à la toute fin, la famille doit partir », explique-t-il, conscient qu’il classe, possiblement, le plus beau fonds de sa carrière. De cette coexistence forcée, la famille a conservé des traces exceptionnelles : « Il y a des photos volées des officiers allemands, prises par une fenêtre à l’étage. Et également des dessins d’Allemands assistant à un spectacle de clowns dans la cour, signés d’une des petites filles de la famille en 1943, révèle l’archiviste, spécifiquement chargé des fonds d’origine privée. Sans oublier le journal, tenu par l’une des femmes de la famille, des journées de la Libération, du 4 au 11 août 1944 ». Des heures d’angoisse extrême, où la famille a craint, à de nombreuses reprises, l’exécution de ses hommes par les Allemands. « Pour un historien, il y a de quoi faire une monographie exceptionnelle », considère Arnaud Guguin, qui en a encore pour de longs mois de classement.

D’autres trésors sommeillent depuis longtemps dans les réserves des Archives départementales, qui ne demandent qu’à être découverts. « On s’aperçoit qu’il y a des historiens qui écrivent sans retourner dans les archives, constate l’archiviste Marielle Duflos. La collecte des archives publiques sur la Seconde Guerre mondiale est terminée, mais il y a encore beaucoup de fonds méconnus, qu’on s’emploie à collecter, classer, mettre en valeur ». Dans la centaine de mètres de fonds publics de cette époque (sur les 33 km que recèlent les Archives départementales), elle cite celui de la sous-préfecture de Lorient, particulièrement les demandes de naturalisation. « Elles sont intéressantes parce que le parcours des demandeurs est détaillé, avec des lettres. Dedans, on a des Résistants, notamment des Espagnols du maquis de Saint-Marcel ». Autre pépite, le fond de l’hôpital de Lesvellec, à Saint-Avé (ancêtre de l’EPSM), « qui a accueilli beaucoup de réfugiés de Lorient, quand la poche de Résistance allemande s’est formée ». Ou bien encore, les archives ignorées du lycée Joseph-Loth de Pontivy. « On a les conseils de discipline, dont un de juin 1941 sur l’esprit d’insubordination envers l’occupant des élèves de 3e, qui avaient écrit des slogans contre les Allemands ». Premier maillon de l’histoire locale, les archivistes continuent de tisser une matière bien vivante, à 80 ans de distance. « L’intérêt est de défricher, d’apporter autre chose, pour éviter de revoir toujours les mêmes photos, et parfois, les mêmes erreurs », souligne Marielle Duflos.