C’est un travail de fourmi qui est actuellement réalisé aux archives départementales de la Somme. En lien avec les 80 ans de la Libération, le service constitue un fonds consacré aux archives de cette époque et rassemble des documents voués à être consultés par des chercheurs, des étudiants ou des habitants curieux. L’occasion de découvrir par exemple les cahiers de doléances rédigés en 1944 et 1945, ou de relire a posteriori des lettres de dénonciation conservées au moment de l’épuration.
Des centaines de cahiers de doléances à disposition des archives
D’octobre 1944 à décembre 1945, les comités départementaux de la Libération créés à l’initiative du Conseil National de la Résistance sont chargés d’organiser les États généraux de la Renaissance française. De là naissent les cahiers de doléances ou « cahiers de la renaissance française » dans lesquels les élus locaux et les citoyens sont invités à écrire leurs espoirs pour l’avenir et s’exprimer sur le programme du CNR, « Les Jours Heureux ». Ce sont notamment ces cahiers de doléances qu’Inès Guérin, archiviste du département de la Somme, lit et classe pour constituer un fond Libération. Elle trouve des vœux parfois surprenants, comme « plus de respect et d »amour à l’école pour que chaque élève puisse respecter les professeurs, mais aussi ses camarades et lui-même« .
Dans le cahier de doléances de la commune des Caours, par exemple, se trouvent les points suivants : « veiller au châtiment des traîtres » ; « suppression de tous les intermédiaires institués par le gouvernement de Vichy » ; « l’instauration d’une véritable démocratie économique et sociale, impliquant l’éviction des grandes féodalités économiques et financières de la direction de l’économie. » Ces cahiers de doléance ont disparu de la mémoire collective mais renvoient pourtant une période très récente de notre histoire, rappelle Inès Guérin qui a elle-même redécouvert leur existence : « après la crise des Gilets Jaunes, on a aussi eu l’occasion de participer à la vie citoyenne à travers des vœux. »
Un travail de classement pour servir aux futurs chercheurs et curieux
Outre les cahiers de doléances, Inès Guérin rassemble plusieurs autres collections, qui ont trait au fonctionnement du comité départemental de Libération, de celui de la commission d’épuration ou de la commission des municipalités. Même si elle ne peut pas tout lire, certains documents comme des lettres de dénonciation attirent forcément son attention. « On a une chance extraordinaire de pouvoir toucher à ces documents » reconnaît-elle.
Ces collections ainsi rassemblées en un fond commun sont dûment classées, et seront rangées parmi les 27 kilomètres d’archives déjà entreposés en sous-sol, à Amiens. Les documents sont ensuite consultable par le grand public, le public étudiant ou les chercheurs, à condition d’avoir 18 ans et de présenter une pièce d’identité : « on a quelques chercheurs en salle de lecture qui attendent déjà ce fonds avec impatience, sourit Inès Guérin. Et puis on est en relation avec une professeure de sociologie de l’UPJV, avec laquelle on va travailler sur les fonds de la commission d’épuration. Le but étant avec les élèves d’analyser le profil sociologique soit des résistants, soit des collaborateurs. »
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